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Programme de gestion des situations d’urgence sanitaire de l’OMS

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Introduction

La Région de la Méditerranée orientale connaît des crises d’une ampleur et d’un degré sans précédent. Près des deux tiers des pays de la Région sont touchés directement ou indirectement par des situations d’urgence, dont quatre pays (sur un total de six au niveau mondial) connaissant des situations d’urgence « majeures » classées au niveau 3 par l’OMS et les Nations Unies : il s’agit de l’Iraq, de la Somalie, de la République arabe syrienne et du Yémen. La Région héberge aussi des pays qui connaissent des situations d’urgence prolongées, dont l’Afghanistan, le Liban, la Libye, le Pakistan, la Palestine et le Soudan. De nombreux autres pays sont touchés par des crises dans les pays voisins

Action de l’OMS

Le nombre croissant de personnes qui ont besoin de services de santé continue de mettre à l’épreuve les capacités de riposte de l’OMS et des partenaires de santé. Fin 2016, sur un total de 140 millions de personnes ayant besoin de services de santé au niveau mondial, plus de 76 millions (54 %) habitaient dans des pays de la Région qui étaient touchés directement ou indirectement par des situations d’urgence. L’insécurité actuelle et l’accès limité des travailleurs humanitaires aux personnes dans le besoin ont continué de compromettre l’action de l’OMS. En Iraq, en République arabe syrienne et au Yémen, près de 30 % de toutes les personnes dans le besoin vivent dans des zones difficiles d’accès, inaccessibles et contrôlées par l’opposition.

Les attaques perpétrées contre les soins de santé dans la Région se sont poursuivies sans relâche. En 2016, plus de 252 attaques ont été rapportées par huit pays, ce qui représente 83 % de toutes les attaques signalées dans le monde. La République arabe syrienne demeure le pays le plus dangereux au monde pour les agents de santé, avec près de 70 % de toutes les attaques notifiées à l’échelle mondiale.

Des milliers de civils sont exposés à des risques de traumatismes chaque mois dans la Région suites à l’escalade des conflits. En République arabe syrienne seulement, plus de 25 000 personnes sont blessées chaque mois et nécessitent des soins de traumatologie. En Iraq, plus de 3000 personnes ont été blessées au cours des dix premières semaines qui ont suivi le lancement des opérations militaires à Mossoul en octobre 2016.

La Région supporte également la plus forte charge de populations déplacées dans le monde, avec plus de 30 millions de personnes déplacées dans l’ensemble de la Région. Plus de la moitié des réfugiés dans le monde viennent de République arabe syrienne, de Somalie et d’Afghanistan. La République arabe syrienne représente le pays ayant le plus grand nombre de réfugiés et de personnes déplacées à l’intérieur de leur pays, avec plus de 65 % de la population déplacées à l’intérieur et dans les pays voisins.

La demande de services de santé pour les populations déplacées ajoute grandement à la charge pesant sur les systèmes de santé nationaux dans la Région. Des coûts élevés pour les services, des pénuries de ressources humaines, un nombre insuffisant de médicaments et d’équipement, ainsi que la détérioration de la situation économique sont quelques exemples des nombreuses barrières auxquelles se heurtent les réfugiés recourant aux soins de santé.

Pour la première depuis plusieurs années, l’OMS a pu atteindre 18 zones assiégées en République arabe syrienne en 2016. Au cours des opérations militaires menées à Alep-est, l’OMS a joué un rôle clé dans les négociations avec toutes les parties au conflit, et a élaboré un plan d’évacuation médicale complet conçu pour sauver les vies de centaines de blessés et de patients gravement malades pris au piège dans la ville. On dénombre 811 patients ayant pu être transportés avec succès vers des hôpitaux d’Alep-ouest, d’Idleb et vers la Turquie.

L’OMS et ses partenaires ont soutenu une campagne nationale de vaccination multi-antigènes sans précédent en République arabe syrienne qui s’est déroulée en trois tournées entre avril, juillet et novembre 2016. Cette campagne de vaccination accélérée a été la première opportunité pour des milliers d’enfants vivant dans des zones assiégées et difficiles d’accès d’être vaccinés depuis le début du conflit.

En Iraq, l’OMS a soutenu la fourniture de soins traumatologiques aux personnes affectées par la crise de Mossoul en créant quatre points de stabilisation pour les traumatismes, ainsi qu’un hôpital de campagne proches des lignes de front. Tandis que les opérations militaires se poursuivaient, des cliniques médicales mobiles et des équipes médicales mobiles soutenues par l’OMS ont parfois été les premières à atteindre des zones rendues accessibles depuis peu afin de fournir des services de soins de santé à des milliers de personnes privées de toute aide depuis juin 2014.

Une attaque perpétrée contre un hôpital de Médecins Sans Frontières en octobre 2015 à Koundouz, en Afghanistan, a nécessité l’action de l’OMS et de ses partenaires pour combler des pénuries critiques et permettre ainsi de sauver des vies dans cette province touchée par le conflit. En juillet 2016, l’OMS a mis en place une unité de soins traumatologiques dans l’hôpital régional de Koundouz afin de pouvoir prendre en charge les blessés de masse, et a également soutenu la création d’un centre de réadaptation physique et psychologique au sein de l’hôpital. Entre juillet 2016, date de son ouverture, et décembre de la même année, plus de 2400 patients ont été pris en charge dans l’unité de soins traumatologiques et les chirurgiens ont procédé à 1045 opérations majeures et mineures.

Deux hôpitaux de campagne financés grâce au soutien de l’OMS ont été créés dans des zones prioritaires de Libye où les établissements de soins de santé n’étaient plus fonctionnels. Un hôpital de campagne à Benghazi a permis de combler un besoin critique dans un contexte où 10 hôpitaux de la ville sur 14 n’étaient plus fonctionnels. Un deuxième hôpital de campagne a été mis en place dans la région de la Montagne Verte, avec une population desservie de plus d’un demi-million de personnes. Même dans les circonstances les plus difficiles en Libye, l’OMS est parvenue à réaliser en 2016 une évaluation sanitaire nationale pour la première fois en quatre ans. Cette dernière a permis d’identifier certains besoins importants, plus particulièrement à Benghazi où plus de 50 % de tous les hôpitaux n'étaient pas fonctionnels.

En avril, l’OMS a entrepris une évaluation complète en Somalie en se concentrant sur environ 1074 établissements de soins de santé publique à travers le pays. Cette évaluation des établissements de santé a été la première du genre à être conduite par les autorités sanitaires et les partenaires en Somalie. En décembre, une flambée de choléra dans la région de Shabeellaha Dhexe en Somalie a été maîtrisée ; le nombre de cas a diminué grâce à une forte coordination entre les partenaires de santé, une campagne d’information et de prévention a été menée avec succès, et des formations ont dispensées pour les agents de santé. Les données de surveillance ont permis aux pays de suivre la transmission, de même que de prendre des mesures de lutte appropriées dans les zones névralgiques. Les échantillons ont été envoyés au tout premier laboratoire somalien créé en 2016 avec le soutien de l’OMS, ce qui a permis de réduire considérablement les délais d’obtention des résultats.

Maladies infectieuses émergentes

Les maladies infectieuses émergentes, y compris les flambées de ces dernières années, sont apparues dans des pays ayant une situation sécuritaire menacée et en proie à des situations d’urgence humanitaire prolongées dans lesquelles un grand nombre de personnes ont été déplacées à l’intérieur de leur propre pays, et où l’accès à l’eau potable, à des services d’assainissement et aux services de santé de base est insuffisant. Les systèmes de surveillance des systèmes de santé fragiles peuvent échouer à détecter toutes les menaces de santé en temps voulu, ce qui compromet l’efficacité des actions de santé publique et rend les populations encore plus vulnérables face aux maladies infectieuses. Le fait que le virus Zika puisse se propager dans la Région demeure également une préoccupation réelle. En outre, étant donné que la population n’est pas immunisée contre ce nouveau virus, les mesures de préparation doivent être maintenues afin de prévenir toute introduction.

Les flambées de choléra au Yémen et en Somalie ont été maîtrisées avec efficacité grâce à des interventions de santé publique appropriées qui ont permis d’éviter une propagation internationale majeure. Le Réseau d’alerte et d’intervention rapides (EWARN) en Iraq a prouvé sa souplesse en évoluant rapidement de façon à gérer un grand nombre de populations déplacées à Mossoul à la suite de l’escalade des activités militaires en septembre 2016.

Dans 16 pays, les systèmes de surveillance pour les maladies de type grippal et les infections respiratoires aiguës sévères ont permis la détection de la grippe épidémique et d’autres infections respiratoires aiguës dans la Région, ainsi que l’organisation de la riposte. Des missions techniques ont été menées afin de renforcer les capacités de préparation et de riposte contre le MERS-CoV en Arabie saoudite, et contre la maladie à virus Zika en Égypte, au Pakistan et au Soudan.

Le Réseau mondial d’alerte et d’action en cas d’épidémie (GOARN) a été élargi dans la Région de façon à inclure de nouveaux partenaires internationaux à la communauté d’experts régionaux dans le but de répondre aux flambées de maladies infectieuses et aux autres situations d’urgence sanitaire. Des équipes d’intervention rapide ont été formées en Arabie saoudite et en Somalie en vue d’un déploiement à travers le pays pour organiser la détection de la flambée, la riposte contre celle-ci et son endiguement. Afin de renforcer l’état de préparation permettant une riposte internationale aux flambées, un groupe d’experts de santé publique a été formé aux enquêtes sur le terrain et à la riposte aux urgences de santé publique, dans le cadre des activités du réseau GOARN dans la Région. Le Bureau régional a soutenu l’Arabie saoudite dans la conduite d’actions de préparation de santé publique en déployant une équipe d’experts qui a dispensé des conseils utiles pour la prévention de tout type d’urgence sanitaire majeure pendant le pèlerinage.

Cinq pays (la Jordanie, la République arabe syrienne, la Somalie, le Soudan et le Yémen) ont bénéficié d’une assistance technique pour l’élaboration de plans complets de préparation et de riposte au choléra faisant la promotion d’interventions de prévention et de lutte intégrées. Dans le cadre de ce plan d’élimination du choléra, une campagne de vaccination anticholérique par voie orale a été menée dans l’État du Nil Blanc au Soudan, ciblant les réfugiés et les communautés d’accueil afin de prévenir la propagation du choléra parmi les réfugiés fuyant le Soudan du Sud.

Conformément au Cadre de préparation en cas de grippe pandémique et suite à l’action du Bureau régional en matière de préparation en cas de grippe pandémique, la surveillance épidémiologique et virologique des maladies de type grippal et des infections respiratoires aiguës sévères a été renforcée dans 16 pays. Une plate-forme interactive en ligne, le Réseau Grippe de la Méditerranée orientale, a été déployée afin que les pays puissent partager les données épidémiologiques et virologiques portant sur la grippe sur une base régulière.

Depuis la déclaration du 1er février 2016 selon laquelle les groupes de cas de microcéphalie que l’on pensait associés à la maladie à virus Zika constituaient une urgence de santé publique de portée internationale, l’OMS a rapidement intensifié ses mesures de préparation et de disponibilité opérationnelle afin de prévenir l’introduction de la maladie à virus Zika dans la Région. Le Bureau régional a mis au point, en collaboration avec les pays, un plan de préparation régional pour la maladie à virus Zika. Dans le cadre de ce plan, des évaluations des risques systématiques ont été conduites dans la Région, la surveillance entomologique des vecteurs compétents a été renforcée dans tous les pays à risque élevé, des manuels adaptés de communication sur les risques ont été mis au point et distribués, et un groupe de responsables en santé a été formé sur les rôles et responsabilités qui sont à l’œuvre dans le système de gestion des incidents liés à Zika, un mécanisme de riposte important pendant les situations d’urgence sanitaire.

Préparation

D’autres défis sont liés au développement et à l’amélioration de l’état de préparation national et de la réduction des risques de catastrophes. Les plans nationaux de santé publique pour la préparation et la riposte à tous types de risques, ainsi que des évaluations nationales des risques potentiels dans les pays de la Région sont pratiquement inexistants. Plusieurs activités ont été conduites afin de renforcer les capacités nationales en matière de réduction des risques de catastrophes, sur la base du Cadre de Sendai pour la réduction des risques de catastrophes, mais il reste encore beaucoup à faire. Les rassemblements de masse dans la Région nécessitent une action intensifiée de la part de l’OMS et des partenaires de  santé dans les domaines de la planification reposant sur des données factuelles pour tous les types d’urgences de santé publique, ainsi que du renforcement des capacités nationales pour répondre aux besoins sanitaires aigus qui apparaissent lors de ces événements.

L'élaboration et le calcul des coûts des plans d’action nationaux pour la sécurité sanitaire sur la base des résultats de l’évaluation externe conjointe des capacités du RSI requièrent l’implication de toutes les parties prenantes nationales concernées, notamment la société civile et le secteur privé. Il est également nécessaire de garantir que les responsabilités en matière de sécurité sanitaire soient assignées aux plus hauts niveaux d’autorité afin d’assurer la bonne mise en œuvre de ces plans. Aligner les plans nationaux pour la sécurité sanitaire sur d’autres plans existants, et mobiliser des ressources domestiques et externes afin de financer et de mettre en œuvre ces plans demeurent les défis principaux à relever.

Le soutien des donateurs au programme régional des situations d’urgence sanitaire reste faible. En 2016, les appels de l’OMS pour la Région ont été financés à hauteur de 39 %, avec 164 millions de dollars reçus sur 425 demandés. L'accès restreint aux populations affectées du fait de l’amplitude des conflits et de la violence actuellement à l’œuvre demeure un frein de taille à l’augmentation du soutien des donateurs.

Entre avril et décembre 2016, l’OMS et ses partenaires ont soutenu 10 pays de la Région dans la conduite d’évaluations externes conjointes des capacités requises au titre du RSI (Afghanistan, Bahreïn, Jordanie, Liban, Maroc, Pakistan, Qatar, Somalie, Soudan et Tunisie). Des plans de soutien aux autres pays pour la réalisation d’évaluations sont en cours. Un appui a été fourni au Pakistan et à la Jordanie en vue de l’élaboration de plans d’action nationaux pour la sécurité sanitaire ainsi que pour le calcul des coûts afférents, sur la base des résultats de l’évaluation externe conjointe. Un dialogue avec les partenaires est en cours afin de coordonner le soutien aux autres pays ayant mené des évaluations dans le but d’élaborer des plans d’action et d’en évaluer le coût.

Le nouveau cadre de suivi et d’évaluation au titre du RSI a été présenté aux pays lors d’une réunion régionale, et une attention particulière a été accordée aux évaluations externes conjointes ainsi qu’aux moyens d’améliorer la manière dont elles sont réalisées dans les pays. Le Bureau régional a été en tête des efforts menés à l’échelle mondiale en vue de mettre au point des orientations sur la conduite d’évaluations externes conjointes dans les pays en crise. Ces orientations seront testées en Iraq et en Libye dans un premier temps en vue de mener les évaluations dans ces pays.

La première phase d’une évaluation de tous les risques a été menée avec succès dans les provinces prioritaires d’Afghanistan en 2016 afin de souvenir la planification opérationnelle des interventions d’urgence. La deuxième phase doit avoir lieu en 2017. Le Bureau régional a accueilli le premier séminaire-atelier portant sur la Capacity for Disaster Reduction Initiative [Initiative de renforcement des capacités de réduction des catastrophes]. Celui-ci avait pour objectif de renforcer les capacités de soutien des partenaires à la mise en œuvre du Cadre de Sendai pour la réduction des risques de catastrophes. Des représentants de l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture, du Programme mondial alimentaire, du Bureau de la coordination des affaires humanitaires de l’Organisation des Nations Unies, du Programme des Nations Unies pour le développement, ainsi que les personnels des bureaux régionaux et de pays de l’OMS ont participé à ce séminaire-atelier.

Afin de renforcer la préparation aux situations d’urgence, des formations ont été organisées pour les points focaux chargés des situations d’urgence dans les pays de la Région, en partenariat avec le Centre asiatique de préparation en cas de catastrophe, l’Université Johns Hopkins et le Centers for Disease Control and Prevention (Atlanta), dans le but de renforcer le leadership et la coordination multisectoriels dans les phases de riposte aux situations d’urgence de santé publique englobant l’ensemble des risques. L’OMS a travaillé en étroite collaboration avec le Comité permanent interorganisations afin d’évaluer l’état des capacités de préparation opérationnelle des bureaux de pays pour répondre aux risques prioritaires. Des évaluations ont été menées au Soudan et en Somalie en 2016, et des plans d’action ont été élaborés sur la base des résultats des missions d’évaluations externes conjointes et des évaluations des capacités des pays en matière de préparation aux situations d’urgence.

Afin de renforcer les capacités des pays à répondre à la demande additionnelle de services de santé découlant de l’accueil des réfugiés et des migrants, un groupe de travail rassemblant toutes les organisations internationales et régionales concernées ainsi que des institutions universitaires est en cours de mise en place. L’OMS et l’Organisation internationale pour les migrations constitueront le secrétariat de ce groupe de travail. Il aura pour objectif de soutenir les pays du Moyen-Orient et d’Afrique du Nord dans la concrétisation et la mise en œuvre de la stratégie mondiale, ainsi que des priorités et du cadre régionaux sur la santé des migrants.