Centre des médias | Actualités | Venez à la rencontre des héros qui assurent le fonctionnement de notre système d'intervention d'urgence : Dr Ahmed Al Soofi, Chef du Bureau auxiliaire de l'OMS à Al Hudaydah (Yémen)

Venez à la rencontre des héros qui assurent le fonctionnement de notre système d'intervention d'urgence : Dr Ahmed Al Soofi, Chef du Bureau auxiliaire de l'OMS à Al Hudaydah (Yémen)

Envoyer Imprimer PDF

Épisode 5

Dr Ahmed Al Soofi, Head of WHO suboffice in Al Hudaydah, YemenDr Ahmed Al Soofi
Chef du Bureau auxiliaire de l’OMS à Al Hudaydah (Yémen)
Mon parcours au sein de l’OMS a commencé en 2007, après des années de service au ministère de la Santé du Yémen ainsi que dans une organisation non gouvernementale belge dédiée à l’assistance aux personnes handicapées.

Nichée au bord de la mer Rouge, la ville d’Al-Hudaydah présente des défis uniques. Elle a connu des années de conflit et continue de souffrir d'une instabilité constante. Cette situation s’est aggravée au cours des derniers mois, les répercussions de la guerre dans le Territoire palestinien occupé se faisant sentir au Yémen. En fait, pas plus tard que l’autre jour, alors que je quittais le bureau, une frappe aérienne s’est produite à proximité, à environ 500 mètres.

Mais les choses n’ont pas été faciles ici depuis des années. La deuxième moitié de 2018 a représenté l’une des périodes les plus difficiles pour al-Hudaydah. Je me souviens avoir effectué le voyage d'al-Hudaydah à Aden, où vit ma famille, pour y passer les derniers jours du Ramadan, lorsque j'ai dû retourner au travail immédiatement après mon arrivée à la maison.

Alors que j'arrivais tout juste à Aden, j'avais reçu un appel urgent du Représentant de l'OMS au Yémen, qui se trouvait à Genève à l'époque. Il m’informait que la situation à Al-Hudaydah s'aggravait rapidement et qu'elle était devenue la zone principale du conflit au Yémen. Je me mis donc en route pour le bureau. Je suis rentré d’Aden à Hudaydah – un trajet d’environ 450 km en véhicule tout-terrain, qui a pris 12 heures – après n’avoir passé qu’une seule journée à la maison.

Lorsque je suis arrivé au bureau, j'ai réalisé à quel point il était crucial que je sois de retour. Les conditions de sécurité se sont rapidement détériorées et, en quelques jours, Al-Hudaydah est devenue une ligne de front du conflit. Notre personnel essentiel, une équipe de huit personnes, a dû se terrer dans le sous-sol du bureau de l’OMS pendant des mois en raison des frappes aériennes et des tirs d’artillerie constants dans la ville. En une semaine, il y eut parfois près de 200 raids, généralement sous forme de frappes aériennes.

Je me souviens très bien de la manière dont nous avons travaillé jour et nuit. Je supervisais les opérations de l’OMS sur le terrain et nous faisions tous de notre mieux pour soutenir la riposte d’urgence au Yémen et veiller à ce que les fournitures médicales parviennent aux établissements de santé et aux communautés à temps. D'autres agences des Nations Unies ont également utilisé notre bureau. J'ai alors appris comment, dans les moments difficiles, les gens se réunissent et travaillent ensemble. Nous avons bien travaillé en coordination et nous nous sommes mutuellement soutenus.

Alors que nous étions aux prises avec le conflit en cours, une nouvelle série de défis est survenue avec le début de la pandémie de COVID- 19. Il y avait une nervosité extrême lorsque la COVID-19 a paralysé la vie telle que nous la connaissions. Mais alors que le monde était à l'arrêt, nous nous trouvions dans une crise humanitaire et notre travail ne pouvait pas s'arrêter.

Father of Ahmed Al Soofi

L'équipe a organisé une réunion virtuelle tous les jours à 9 heures et a continué son travail tout en prenant toutes les précautions possibles pour se protéger du virus. C'est alors que mon père est tombé gravement malade en Jordanie. La situation sécuritaire était trop instable pour que je puisse me déplacer par la route pour le voir et tous les aéroports étaient fermés. Je voulais vraiment lui rendre visite, mais ce n'était pas possible, et il est finalement décédé. C'était tellement difficile d'être loin de mon père et de ne pas pouvoir être à ses côtés durant ses derniers jours. Je n’ai pas ni lui dire au revoir ni être présent à ses funérailles.

Le travail humanitaire m'a apporté plusieurs enseignements inestimables sur la manière de vivre. Dans certaines des périodes les plus difficiles, comme je l’ai mentionné au sujet des frappes aériennes en 2018, j’ai appris l’importance de la coopération et du partenariat. Les crises nécessitent une collaboration pour atteindre des objectifs communs. La manière dont nous nous nous sommes rassemblés en tant que partenaires des Nations Unies nous a permis de tirer parti des forces de chacun et de travailler dans le cadre d’une équipe unie.

J'apprends également beaucoup des gens ici au Yémen. Après avoir connu tant de conflits et de terribles conditions humanitaires, ils font encore preuve de beaucoup de force et de résilience. En être témoin fut une source d’inspiration et m’a appris que même dans des circonstances difficiles, l’espoir reste possible.

Ce qui me donne de la force et de la clarté et m'aide à faire face aux défis de ma vie professionnelle, c'est une passion profonde que j’ai pour l'exploration du mysticisme lié à différentes cultures. J’ai notamment un penchant pour le soufisme. Cela me procure un sens profond de la spiritualité et m’aide à construire une compréhension plus profonde et une plus grande appréciation des valeurs et des croyances qui régissent la vie des gens dans le monde entier. Ceci renforce ma connexion à la fois avec mon moi intérieur et avec autrui, et j’apprécie le processus qui consiste à m’immerger dans ce champ de sagesse et de contemplation.

Liens connexes

Episode 1 
Episode 2
Episode 3 
Episode 4
Episode 5