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Déclaration du Directeur régional sur la crise sanitaire au Soudan

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21 november 2023 – L’attention mondiale étant à présent tournée vers la situation terrifiante à Gaza, nous ne devons pas oublier que le peuple soudanais continue de subir des souffrances d’une ampleur tout aussi catastrophique.

Les chiffres en provenance du Soudan sont vertigineux : près de 25 millions de personnes ont besoin d’une aide humanitaire et 11 millions d’une assistance sanitaire d’urgence. Plus de 20 millions de personnes ont maintenant atteint des niveaux élevés d’insécurité alimentaire aiguë et un enfant de moins de cinq ans sur sept au Soudan souffre de malnutrition aiguë. Quelque 4,2 millions de femmes, de filles et de membres des populations vulnérables sont confrontés au risque de violence sexiste – qui peut être mortelle – et n’ont qu’un accès limité, voire inexistant, à des services de protection et de soutien.

Regional Director statement on the health crisis in Sudan

Alors que les combats se poursuivent sans relâche dans les principales régions du pays, en particulier celles du Darfour, du Kordofan et de Khartoum, les derniers chiffres officiels que nous avons reçus le 3 novembre font état de 32 679 personnes blessées. Le nombre réel de blessés est probablement beaucoup plus élevé, car de nombreuses zones sont à présent extrêmement difficiles d’accès en raison de l’insécurité. Selon les estimations, 70 % des hôpitaux situés dans les États touchés par le conflit ne sont plus opérationnels et les hôpitaux restants sont submergés par l’afflux de personnes en demande de soins, qui sont pour beaucoup des personnes déplacées. Les enfants représentant environ la moitié des 6,3 millions de personnes contraintes de fuir la violence, le Soudan est aujourd’hui le pays qui connaît la plus grande crise de déplacement d’enfants au monde.

Nous sommes gravement préoccupés par la situation au Darfour. La plupart des hôpitaux ne seraient pas opérationnels en raison des pillages, des dégâts et des pertes de personnel, tandis que l’insécurité empêche d’apporter l’aide humanitaire en toute sécurité dans la région. Près d’un demi-million de personnes, parmi lesquelles beaucoup nécessitent des soins médicaux immédiats, notamment de traumatologie, ont fui du Darfour vers le Tchad. Les bureaux de l’OMS des pays voisins du Soudan – le Tchad, l’Égypte, le Soudan du Sud, l’Éthiopie et la République centrafricaine – collaborent avec les autorités nationales et les partenaires du secteur de la santé pour assurer la fourniture des soins d’urgence, des services de santé essentiels et des services de vaccination aux milliers de personnes vulnérables qui ont fui la violence. Avec nos partenaires, nous nous efforçons d’organiser une assistance humanitaire transfrontalière fiable pour les zones les moins sûres, la principale priorité étant l’assistance fournie au Darfour occidental et central à partir du Tchad.

L’augmentation spectaculaire des besoins humanitaires est encore compliquée par la propagation rapide d’une flambée de choléra. Depuis la déclaration formelle de la flambée, le 26 septembre à Gedaref, sept États du Soudan ont signalé des cas suspects et plus de 3 millions de personnes seraient menacées. En collaboration avec les autorités sanitaires, l’OMS et ses partenaires tentent d’intensifier rapidement les efforts de riposte afin d’enrayer la propagation, notamment en formant des médecins et des personnels infirmiers à la prise en charge des cas de choléra, ainsi qu’à la prévention et au contrôle des infections. L’OMS a déjà envoyé 3,2 tonnes de kits anti-choléra, contenant notamment des médicaments, des fournitures de laboratoire et du matériel, et soutient pleinement 10 centres de traitement du choléra dans les États de Gedaref, d’Al Jazirah et de Khartoum. En collaboration étroite avec les autorités sanitaires gouvernementales et l’UNICEF, l’OMS a également apporté son soutien à la microplanification d’une campagne de vaccination contre le choléra dans neuf localités de ces mêmes États. Le 14 novembre, 2,9 millions de doses de vaccins anticholériques oraux sont arrivées par avion pour une campagne qui devrait débuter à la fin du mois dans six localités de l’État de Gedaref et ultérieurement dans une localité de l’État d’Al Jazirah et deux localités de l’État de Khartoum.

L’OMS apporte également un appui prioritaire à 80 hôpitaux des 18 États pour faire en sorte que les communautés aient accès aux services de santé essentiels, notamment aux soins obstétricaux d’urgence. Outre l’appui direct qu’elle apporte à 21 cliniques fixes ou mobiles, l’Organisation travaille avec ses partenaires pour maintenir les soins de santé primaires. L’OMS soutient également 57 centres de stabilisation nutritionnelle, grâce à la présence sur le terrain de neuf experts en nutrition de l’Organisation, tandis que des kits de traitement pour plus de 20 000 patients atteints de malnutrition aiguë sévère ont été distribués à 16 des 18 États du Soudan.

Toutefois, l’insécurité et les obstacles opérationnels compliquent toujours la livraison de fournitures et la prestation de services en temps utile, ainsi que les efforts de lutte contre les maladies. Compte tenu des 60 attaques, vérifiées par l’OMS, contre les services de santé – ciblant des hôpitaux, des cliniques, des laboratoires, des ambulances, des agents de santé et des patients – nous nous réjouissons vivement de la Déclaration d’engagements adoptée le 7 novembre à Jeddah par les parties au conflit afin de protéger les civils, de faciliter l’accès humanitaire sans entrave et d’établir un forum humanitaire pour le Soudan dirigé par le Bureau des Nations Unies pour la coordination des affaires humanitaires. Toutefois, la moitié de ce type d’attaques ayant eu lieu depuis la première Déclaration de Jeddah signée le 11 mai 2023, l’OMS appelle instamment les parties à honorer cette promesse. Les attaques contre les services de santé doivent cesser immédiatement – elles perturbent sévèrement la prestation des soins de santé et aggravent encore une situation humanitaire déjà désespérée.

Malgré les niveaux d’insécurité élevés, l’OMS est restée sur place et a mené ses activités depuis le début de la dernière escalade du conflit au Soudan, répondant aux besoins de santé et luttant contre les nombreuses menaces pour la santé, notamment les épidémies de choléra, de rougeole, de dengue et de paludisme. Nos équipes travaillent en étroite collaboration avec leurs homologues et leurs partenaires du secteur de la santé nationaux pour procurer des fournitures vitales, assurer la continuité des soins de santé essentiels, fournir des conseils spécialisés, coordonner les nombreux partenaires du secteur de la santé, organiser des formations et assurer la surveillance des maladies et la riposte aux flambées épidémiques. Depuis le 15 avril, l’OMS a livré plus de 260 tonnes de médicaments et de fournitures médicales aux autorités sanitaires nationales et à ses partenaires du secteur de la santé.

Nous remercions sincèrement nos donateurs qui nous permettent d’être aux côtés de nos frères et sœurs soudanais, manifestant ainsi notre vision régionale de « la Santé pour tous et par tous ». Cette crise majeure est cependant largement négligée par la communauté mondiale. Nous avons besoin de l’engagement renforcé et du soutien de nos donateurs afin de pouvoir amplifier notre action salvatrice au Soudan et répondre aux besoins sur le terrain complexes et en augmentation constante. Le peuple soudanais a besoin de la solidarité et de la compassion du monde comme jamais auparavant. Chaque retard coûte des vies humaines. Le monde ne peut pas oublier le Soudan. Le monde ne peut pas abandonner le Soudan.