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Sauver des vies et des membres : L'OMS renforce sa réponse face aux traumatismes en Somalie

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Doctors-examine-leg-injuryL’équipe opérationnelle et consultative de l’OMS sur les traumatismes se rend à l’unité des urgences de l’hôpital Madina, à Mogadiscio, en Somalie. @OMS/Sara Halimah

Le 11 décembre 2022, Le Caire -- La Somalie a connu un des pires attentats de masse suite à la double explosion de bombes survenue le 29 octobre 2022, qui a fait plus de 117 morts et 344 blessés parmi les civils. Près de 70 % des décès par traumatisme ont eu lieu avant que les victimes ne puissent atteindre l'hôpital.

Une charge de santé publique majeure en Somalie, exacerbée par le conflit, les traumatismes entraînent chaque mois près de 80 vies perdues et plus de 200 civils blessés par des explosions, rien qu'à Mogadiscio. Les enfants représentent au moins un tiers du nombre total des victimes, dont beaucoup souffrent d'un handicap à vie. La recrudescence des incidents violents et des décès qui y sont associés ne cesse d’augmenter et il est urgent de renforcer les capacités de riposte du pays face aux traumatismes. L’Organisation mondiale de la Santé a déployé son équipe régionale opérationnelle et consultative pour les traumatismes à Mogadiscio afin d’apporter un soutien supplémentaire et une assistance technique.

Les résultats préliminaires de l'équipe ont révélé qu'au moins un tiers des décès auraient pu être évités avec un système de soins pré-hospitaliers adéquat. Cependant, il n’existe pas de système unifié de soins pré-hospitaliers dans tout le pays, ni même dans la capitale Mogadiscio, malgré le nombre élevé d’accidents faisant un grand nombre de victimes. Pour aggraver les choses, ceux qui sont en première ligne, et les premiers intervenants, ont peu accès à la formation ou même aux fournitures.

L'hôpital Medina, un « havre de paix » en Somalie.

Situé au cœur de Mogadiscio, l'hôpital Medina est largement reconnu comme le principal hôpital de traumatologie de toute la Somalie. Son unité d'urgence est équipée d'un total de quatre lits, de seulement deux moniteurs de signes vitaux, d'un appareil de radiographie portable et d'aucun scanner.

« Nous recevons parfois une vingtaine de traumatismes par balle au cours d'une seule garde et, chaque mois, environ 400 victimes de traumatismes, sans compter les victimes d'attentats à la bombe », a déclaré à l'OMS le docteur Abdul, médecin des services d'urgence de l'hôpital Medina.

L'infrastructure de l'hôpital comprend une unité de 108 lits, quatre salles opératoires équipées de quatre appareils d'anesthésie et une salle de petite chirurgie avec deux lits d'opération. Situé à une longue distance, il faut jusqu'à six minutes pour atteindre les salles opératoires depuis l'unité d'urgence.

L’équipe de l’OMS a également constaté une grave pénurie de matériel et de fournitures, en particulier de fixateurs externes – utilisés pour maintenir les os fracturés alignés et stabilisés. Le Directeur de l'hôpital de Medina, le Dr Bortaqal, a révélé que « quatre de nos patients attendent toujours d'être opérés, des semaines après l'explosion, simplement parce que nous n'avons pas accès aux fixateurs externes nécessaires », ajoutant que « nos approvisionnements se sont épuisés dans l'heure qui a suivi les explosions ».

Deux médecins du service des urgences au sein du principal hôpital de traumatologie de Mogadiscio.

En ce qui concerne les ressources humaines, les quatre chirurgiens généraux de l'hôpital Medina sont assistés par cinq techniciens anesthésistes – mais aucun médecin anesthésiste. Deux médecins gèrent le service des urgences, aidés par 15 infirmiers. Pendant la garde de nuit, il n'y a qu'un seul médecin dans le service des urgences et un seul chirurgien général dans les salles opératoires.

La gestion des foules est une autre préoccupation majeure durant la réponse apportée par l'hôpital à des incidents impliquant un grand nombre de victimes, les membres de la famille concernés se comportant parfois de manière agressive et les spectateurs se pressant à l'hôpital. Lors de la dernière explosion, la foule a même franchi les portes de l'hôpital. « À un moment donné, il y avait environ 350 spectateurs à l'intérieur et à l'extérieur de notre service des urgences », a déclaré le Dr Saeed, Directeur médical de l'hôpital.

Prise en charge d'un grand nombre de victimes

Lorsque le personnel de l'hôpital Medina a entendu l'explosion de la bombe, qui avait explosé à proximité, sa riposte a été immédiate – et extrêmement difficile. Il n'y a eu aucune communication de pré-alerte de la part d'aucune des ambulances, et la seule méthode de communication interne parmi le personnel de l'hôpital Medina lui-même est un groupe de messagerie instantanée par téléphone portable. « Dans les minutes qui ont suivi l'explosion, 79 patients se sont présentés à l'hôpital. Nous étions tout simplement incapables de gérer la situation », a déclaré le Dr Saeed. Toujours quelques minutes après l'explosion, la morgue avait atteint sa pleine capacité – qui se situe actuellement à sept corps.

Près de 70 patients ont eu besoin de transfusions sanguines, mais il n'existe pas de banque du sang. Il existe cependant une stratégie alternative efficace pour la collecte de sang lors d'événements impliquant un grand nombre de victimes : un autre groupe de messagerie instantanée.

Avant l'arrivée à l'hôpital

L'un des deux seuls prestataires de services pré-hospitaliers de toute la Somalie est Aamin Ambulance, qui ne dessert actuellement que Mogadiscio 24 heures sur 24 et 7 jours sur 7 avec un total de 20 ambulanciers, dont la plupart n'ont aucune formation et travaillent comme bénévoles. Il dispose actuellement de 17 ambulances, dont deux sont hors service. Lors de la récente explosion, Aamin Ambulance a transporté un total de 95 patients ; 23 étaient morts à leur arrivée à l'hôpital.

Parcours OMS de prise en charge des traumatismes 

trauma-teamsVisite avec les premiers intervenants près du site de l'attentat, Mogadiscio, Somalie @OMS/Sara Halimah

Après le double attentat du 29 octobre 2022, le Bureau régional de l’Organisation mondiale de la Santé pour la Méditerranée orientale a déployé une équipe chargée des traumatismes à Mogadiscio pour un soutien immédiat. L’OMS reconnaît toutefois que la prise en charge des traumatismes ne repose pas uniquement sur un soutien renforcé ou sur une seule intervention, mais sur une série d’interventions appelées « parcours de prise en charge des traumatismes ».

« Le résultat du parcours est aussi bon que son maillon le plus faible. Il est donc nécessaire d'investir et d'améliorer les normes de soins pour chaque élément de la chaîne, depuis le stade du traumatisme jusqu'à la réadaptation du patient dans la communauté, en passant par la chirurgie définitive », a déclaré le Dr Richard Brennan, Directeur chargé des situations d'urgence au niveau régional de l’OMS.

L’équipe régionale opérationnelle et consultative pour les traumatismes de l’OMS apporte son soutien au bureau de Somalie pour amorcer ce changement crucial. L'OMS a dressé un bilan avec tous les grands hôpitaux impliqués dans la réponse aux événements impliquant un grand nombre de victimes et elle est en train de mettre en place un service pré-hospitalier unifié, ainsi qu'une formation pour les intervenants de première ligne. L’OMS organise également des cours sur la prise en charge d’un grand nombre de victimes et aide les hôpitaux à actualiser leurs plans d’intervention.

« En collaboration avec le ministère de la Santé publique, l’OMS entend intensifier sa riposte face aux traumatismes dans l’ensemble de la Somalie. Notre objectif est de réduire le nombre de décès et d’incapacités évitables », a déclaré le Dr Sk Md Mamunur Rahman Malik, Représentant de l’OMS en Somalie.

L’équipe régionale opérationnelle et consultative pour les traumatismes de l’OMS fournit un appui technique au bureau de pays de Somalie et au système de santé somalien depuis 2020.